ATTAC
SUD-ESSONNE ne perd pas ses bonnes habitudes et débute l’année en
fanfare avec une conférence-débat « La finance contre la
démocratie » le vendredi 27 janvier.
L’invité
de la soirée est Thierry BRUGVIN, docteur en sociologie,
enseignant-chercheur, membre du conseil scientifique d’ATTAC
Vendredi
27 janvier 20h30 – Centre culturel René Cassin - 25 rue des
vergers Saint Jacques à Dourdan
La
démocratie contre la finance
« Si
les gens de cette nation comprenaient notre système bancaire
monétaire, je crois qu'il y aurait une révolution avant demain
matin » (Henri Ford)
Comment
le système financier international conditionne-t-il les décisions
des États? Comment le pouvoir de décision a-t-il été transféré
vers les structures financières transnationales (banques) et les
superstructures mondiales (Banque mondiale et FMI), plongeant
certains pays dans des politiques d’austérité implacables pour
les populations les plus fragiles ? Parallèlement d’énormes
scandales financiers sont révélés régulièrement au profit
d’hommes politiques ou de personnalités médiatiques, mettant en
évidence un système complexe de circulations occultes des capitaux,
des réseaux d’intérêts privés, au détriment du bien public, le
tout organisé par les plus grandes banques internationales.
Toutes
ces questions seront abordées lors de la conférence que Thierry
Brugvin* tiendra à Dourdan le 27 janvier 2017 sur le thème
« Démocratie et finance ». Au-delà du
constat, il apportera également des pistes de modernisation, des
solutions alternatives de fonctionnement et de contrôle du système
financier, afin de repenser l’exercice du pouvoir de manière
égalitaire, responsable et démocratique.
°°°
Au
sommet de la pyramide du pouvoir économique, se trouvent les banques
et leurs propriétaires. Leur pouvoir repose sur les trois piliers
suivants :
1°
- La dette publique, un outil d'asservissement des peuples
C’est
le cœur du pouvoir, un pouvoir légal et réglementé qui oblige les
pays à emprunter auprès de banques privées pour réaliser leurs
investissements.
Il
existe également des prêts d’ajustement structurel qui sont
accordés par le Fonds Monétaire International ou la Banque
Mondiale pour permettre
aux pays touchés par de grandes difficultés économiques de sortir
d’une crise
financière. Ces prêts sont alors conditionnés à la mise en place
de réformes. Si le pays n’entreprend pas ces réformes imposées
alors par les marchés financiers, les agences de notation dégradent
la note du pays et les taux d’intérêt s'envolent. C'est un moyen
de contrainte très fort sur les politiques des pays concernés.
La
dette est donc un instrument au service de la domination des
états et de leurs peuples par le capitalisme financier et elle peut
être aussi un instrument de corruption au bénéfice de
quelques-uns.
2°
- La création monétaire privée et la spéculation
« Il
n’existe pas de moyen plus efficace pour prendre le contrôle d’une
nation que de diriger son système de crédit » (P.A.
Benson, président d’American Bankers Association – 8 juin 1939)
Les
États n’ont plus le monopole de la création monétaire. La
monnaie fiduciaire (billets et pièces) n’est quasiment plus
utilisée. Les banques créent de la monnaie scripturale (chèques et
monétique), mécanisme de crédit qui aboutit à des moyens de
paiement ex nihilo (à partir de rien) , les flux
monétaires ne sont plus que de simples jeux d’écritures
comptables.
Aujourd'hui,
un banquier est autorisé à « prêter » à hauteur de 8
à 9 fois le montant de ses fonds propres, et ainsi à créer de
l’argent. Ce sont les états qui ont décidé démocratiquement de
ne plus battre monnaie. Ils ont voté des lois qui donnent aux
banques un pouvoir exorbitant en leur permettant de créer une
monnaie virtuelle. Cette monnaie virtuelle prêtées aux états
finance les dépenses publiques.
Comment
en est-on arrivé là ? Les « portes tournantes »
entre la politique et l’économie permettent de faire carrière
alternativement dans l’un et l’autre domaine. G. Pompidou et
l’ex-ministre du Budget E. Macron sont d’anciens responsables de
la banque Rothschild. La majorité des politiques n’ont donc pas
intérêt à créer des lois qui risquent de défavoriser les
intérêts privés de leur classe sociale. Après la Révolution, les
lois votées en France ont principalement défendu l’intérêt des
propriétaires, des industriels, des bourgeois. Dans son ouvrage
« L’argent », Émile Zola au XIXe siècle pointait la
collusion existant entre les banquiers et les hommes politiques.
C’est sous la présidence de Georges Pompidou que la France s’est
vue interdire de contracter des emprunts auprès de la Banque de
France à taux zéro, faisant ainsi basculer la dette publique dans
l’escarcelle des banques privées avec taux d’intérêt. Si cette
disposition n’avait pas été prise, la dette publique de la France
aurait été remboursée depuis 2006…
|
Photo : François Lafite |
3°
- Les paradis fiscaux qui favorisent l'évasion fiscale
Les
paradis fiscaux sont un des rouages de la machine économique
mondiale actuelle. Des scandales à répétition (Luxleaks,
Swissleaks, Panama papers) mettent en lumière un système d’évasion
fiscale à l’échelle mondiale grâce à quelques officines
spécialisées dans ce domaine et à la participation active des
grandes banques internationales. Il s’agit d’une véritable
industrie financière qui brasse des sommes astronomiques. Au niveau
européen, la Commission Européenne estime que 1 000 milliards
d’euros sont perdus chaque année par les budgets nationaux en
raison de l’évasion fiscale et de l’évitement fiscal. Au niveau
de la France, ce sont de l’ordre de 60 à 80 milliards d’euros
qui chaque année s’évanouissent dans les paradis fiscaux. Et
malgré toutes les déclarations des dirigeants politiques, les
paradis fiscaux continuent à prospérer et les grandes banques
françaises et internationales, qui jouent un rôle clé dans
l’industrie de l’évasion fiscale, n’ont toujours pas changé
leurs pratiques.
A
mesure que la crise financière dure et que sont demandés aux
populations des efforts croissants, on note une désaffection des
peuples à l’égard de leurs classes dirigeantes, et l’émergence
à grande échelle d’une véritable crise de confiance.
L’impuissance des dirigeants politiques (ou leur allégeance au
système) et la toute-puissance du pouvoir financier sans régulation
ni contrôle démocratique génèrent des situations totalement
inéquitables à travers le monde, provoquent des crises économiques,
politiques et sociales, et poussent les peuples soumis à des mesures
d’austérité vers des solutions extrémistes.
*Thierry
BRUGVIN, Docteur en sociologie, enseignant-chercheur à l’université
de Besançon, membre du conseil scientifique d’Attac a
pour thèmes de recherche l'action des mouvements sociaux
transnationaux dans la régulation démocratique du travail, du
commerce éthique, équitable et la décroissance et la dimension
illégale et a-démocratique des élites économiques et
politiques internationales.
Il
est spécialisé sur la sociologie des élites et il a déjà publié
plus d’une douzaine d’œuvres collectives sur la gouvernance. Il
est également l’auteur de plusieurs ouvrages, dont :
« Le
pouvoir illégal des élites », (2014), ed. Max Milo,
« Commerce
équitable et éthique : opportunités et limites »,
(2014), L’Harmattan,
« Les
mouvements sociaux face au commerce éthique : une tentative de
régulation démocratique du travail », (2007),
Hermès/Lavoisier