dimanche 11 août 2013

Pétition contre les limites de vitesse : appel à NE PAS signer

Source : "Tenir la route" www.tenirlaroute.fr
Les mots ne trompent pas. L'expression « Rouler à tombeau ouvert », ô combien explicite ne semble pas déranger un certain nombre de nos concitoyens, totalement oublieux du carnage dont les routes françaises furent le théâtre dans les années d'après-guerre jusqu'en 1972, à une époque où le laisser-faire était de règle.

Un exemple ? L'annonce récemment faite par le ministère de l'Intérieur d'un projet de réduction des vitesses maximales autorisées en ville et sur route a eu pour effet immédiat le déclenchement d'une pétition de protestation circulant sur Internet. Ayant eu le privilège (?) de la recevoir, et le sujet nous intéressant (mais peut-être pas pour les mêmes raisons que les expéditeurs) nous avons pris la peine de prendre nos informations. Après tout, le droit de pétitionner constitue un élément fondamental de notre démocratie et n'étant jusqu'à preuve du contraire ni en Russie ni en Corée du Nord, chacun ici a le droit d'exprimer une opinion ou d'alerter ses concitoyens sur quelque sujet que ce soit. Il appartient ensuite au destinataire de se rallier ou non, ce ralliement, pris en toute responsabilité, impliquant toutefois de prendre un minimum de précautions quant à l'origine et au fond du texte proposé.

La pétition en question émane de la Ligue de Défense des Conducteurs  qui, si elle expose clairement ses motivations et actions sur son site Internet reste très discrète sur son fonctionnement. Nous avons vainement cherché à en savoir plus sur le nombre d'adhérents, l'origine et la destination des fonds ou l'identité des membres du Conseil d'Administration. Autant d'informations dont nous sommes preneurs et que nous diffuserons volontiers si nous les obtenons.

En cherchant bien, nous apprenons tout de même que cette association est issue de la Ligue de Défense du Citoyen à laquelle elle s'est substituée en septembre 2012 (voir ici). Cette dernière s'était déjà illustrée par une virulente opposition à la mise en place des éthylotests. Tiens, tiens.

En cherchant un peu plus, nous découvrons aussi qu'elle dispose de moyens confortables (voir les comptes 2012). Jusque là, tant mieux pour elle. Mais alors pourquoi est-il impossible d'en savoir plus ?

Enfin, nous avons effectué un petit tour des sites Internet parlant de la pétition. Indépendamment des sites voués à l'automobile qui pour la plupart se posent les mêmes questions que nous (voir par exemple ici), d'autres sites ne font pas preuve des mêmes scrupules et la soutiennent à bloc. Parmi eux, des sites politiques, classés à la droite de la droite (extrême-droite ou droite dite « populiste »). Citons le FN Alsace, « Droite nationale », « Partisans de Marine » et le site de Bruno Gollnisch.

Alors, à droite toute ? Cela prêterait à sourire dans le cadre d'un sujet sur la conduite automobile, mais même l'humour a aussi ses limites. En tous cas, nous sommes sûrs d'une chose, c'est que cette Ligue de Défense des Conducteurs ne doit pas manquer pas de front.

Avant de conclure sur le sujet des fréquentations, attardons-nous un instant sur la « Société de Calcul Mathématique » que la Ligue de Défense des Conducteurs cite abondamment sur son site Internet.
Cette société (une vraie, une SA, pas une association) vient prêter main-forte à nos pétitionnaires en publiant une étude dont les remarquables calculs démontrent infailliblement l'inexistence de corrélation entre vitesse et accidents mortels. Allez faire un tour sur leur site Internet (Si, si ! Il faut vraiment le faire !). Accessoirement vous y découvrirez aussi que ces braves gens évoluent allègrement dans le climato-scepticisme, pourfendant les énergies renouvelables et soutenant mordicus le nucléaire (on ne connaît pas leur position sur les hydrocarbures de schiste). Un révisionnisme d'un autre genre en quelque sorte.

Dans la série « Dis-moi qui tu fréquentes, je te dirai qui tu es », voilà donc qui nous éclaire.

Venons-en à la méthode d'argumentation et ses grosses ficelles.

La plus évidente d'entre elles est incontestablement l'absence de références venant en appui des arguments chiffrés dont le texte fourmille. L'origine des présumés documents, textes ou études reste inconnue rendant leur consultation intégrale impossible pour le lecteur désireux d'approfondir le sujet. On est prié de faire confiance aux instigateurs de la pétition en se contentant d'un vague « on dispose de données... » ou d'un « selon les premières estimations... »
Et quand, par extraordinaire, la source est citée, comme c'est le cas pour l'étude de l'ADEME, on se rend compte, en consultant le document complet (qu'il faut tout de même rechercher par ses propres moyens) que ses conclusions sont tout à fait à l'opposé de ce qui est annoncé ! (Voir le détail en fin d'article)
Principe bien connu de désinformation : on prend une étude effectuée par un organisme reconnu, on en extrait une remarque ou une réserve formulée honnêtement par les auteurs, et on en fait une généralité, déformant ainsi totalement les conclusions.

Et puisqu'on peut tout dire, pourquoi se priver des affirmations gratuites, dénuées de toute justification mais assénées avec aplomb comme des vérités définitives : « Comme ce sera impossible de tenir des vitesses si basses... » ou : « Les maintenir au niveau actuel (ndlr : les vitesses) est déjà discutable. Mais les baisser, c'est carrément indéfendable »
Le tout à coup de : « Qui peut croire... » ou de : « Et on voudrait nous faire croire... » censés enfoncer le clou.

Il s'ensuit logiquement la victimisation car, bien sûr, nous allons tous être verbalisés et «  Les PV pour "excès" de vitesse vont nous tomber dessus en rafale » ce qui sera « insupportable pour des millions de Français qui ont déjà du mal à joindre les deux bouts ».

Nous sommes désormais en pleine dramatisation, et mûrs pour ne pas rester insensibles à cette déchirante supplique : « S'il vous plaît, aidez-nous à stopper de toute urgence ce projet effroyable »

En ce qui concerne le fond, chacun pourra facilement trouver les contre-arguments. Les sources figurant en fin d'article pourront les y aider.

Mais autant il est inutile d'aller plus loin dans le commentaire, autant il est nécessaire de prendre cette affaire au sérieux.

Craignons l'impact que peut avoir cette pétition dont la démagogie manifeste s'appuie sur notre traditionnelle résistance au changement et la sacralisation de l'automobile.

Craignons également que cette désinformation totalement malhonnête, diffusée par de troubles commanditaires, touche bon nombre de personnes déjà fragilisées par une conjoncture économique incertaine. Et c'est bien là le plus sordide de l'affaire.

C'EST POURQUOI N'HESITEZ PAS A DIFFUSER CET ARTICLE LE PLUS LARGEMENT POSSIBLE AFIN QUE CHACUN PUISSE SE FAIRE UNE IDÉE OBJECTIVE DE LA SITUATION ET, SOUHAITONS-LE, EMPÊCHE EN TOUTE CONSCIENCE LA VAGUE DE SIGNATURES ESPÉRÉE.

Source : Sécurité routière belge

Des sources fiables pour s'informer sur le sujet 

La vérité sur l'étude de l'ADEME (Sources : ici et )
Dans une étude publiée en octobre 2013, l'ADEME a mesuré l'impact environnemental des réductions des limites de vitesse. Il en résulte un gain de 14 % sur autoroute (130 km/h à 120 km/h), de 12 % sur voie rapide (110 km/h à 100 km/h) et de 4 % sur route (90 km/h à 80 km/h).
Cette étude précise également que des gains significatifs seraient enregistrés sans baisser les limites actuelles, à condition qu'elles soient respectées.
En ce qui concerne la circulation en ville (passage de 50 km/h à 30 km/h), les résultats sont contradictoires compte-tenu de l'interaction entre différents facteurs dont les comportements et la configuration des voies, le tout jouant sur la fluidité du trafic.
Nous ferons remarquer qu'un moyen beaucoup plus efficace de réduire la consommation de carburant en ville est tout simplement de laisser sa voiture au garage et d'utiliser tout autre moyen de déplacement, individuel non motorisé ou collectif.


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